Je
crois que nous avons été à peu près les seuls, dans Pacte,
par la voix de M. l’abbé Barthe, à donner pour favori du Conclave le
cardinal Josef Ratzinger, théologien reconnu par tous, jeune et brillant
expert du cardinal Frings au concile Vatican II, archevêque de Munich et,
depuis 1981, inamovible Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la
foi (ex-Saint-Office). Après 36 heures de délibération, la fumée
blanche est apparue et le cardinal Medina, ne pouvant cacher sa
jubilation, annonçait au monde cette grande joie :
“ Josephum ”. Le prénom suffit. Il n’eut pas le temps de
prononcer le nom de Ratzinger. Une immense ovation montait de la place
Saint-Pierre vibrante de gratitude. Elle avait deviné son pape au seul
énoncé de son prénom : cela fait si longtemps que cet Allemand est
Romain... La Ville éternelle l’a adopté comme l’un des siens ; les
fidèles du rang ont appris à le connaître, en écoutant son chemin de
Croix, en le voyant officier gravement en langue latine lors des
funérailles de Jean Paul II et en regardant la messe télévisée pour l’ouverture
du Conclave, qu’il célébrait lui-même en tant que Doyen du Sacré
Collège.
Le
Mentor caché
Les
gens informés savaient quelle place il occupa dans la dernière décennie
du pontificat du pape Wojtyla. On n’en a peut-être pas encore pris une
claire conscience : non seulement Ratzinger se présente comme dans la
ligne de son prédécesseur, mais il fut un peu, pour lui, ce que le
cardinal Eugenio Pacelli (devenu Pie XII) fut à la fin du règne de Pie
XI : un inspirateur et presque un Mentor, pour un pape énergique mais
vieillissant. Est-ce un hasard ? les deux conclaves les plus courts de l’époque
contemporaine sont ceux qui ont vu désigner comme pape Pie XII d’une
part, Benoît XVI d’autre part. |