Si
elle n’est pas inexistante, la relève du clergé est inquiétante.
Joseph Guilbard a vu de jeunes confrères se prenant pour le « prêtre de
toujours ». Le croiriez-vous ? Jusque dans leur tenue et leur
habillement, des obsédés des rites, des gestes et des formules. Ce que
lui « prêtre du concile » avait vu disparaître « sans regret ». Il s’avoue
dubitatif devant « tant d’ardeur à revenir à des pratiques du passé
censées être porteuses des fécondités à venir ». Il voit poindre «
beaucoup de déception et d’amertume ». Voir « tous ses copains
prêtres qui quittent le sacerdoce pour se marier », l’accélération
des départs et des réductions à l’état laïque dont il témoigne ne
lui suffit pas. Gérard Naslin, fanatique d’action catholique raconte :
« Pendant les trois années où j’ai été aumônier national d’ACE,
j’ai vu treize aumôniers départementaux quitter le ministère ».
Michel Patureau n’est pas en reste. Au lendemain de Vatican II, il
était « en relation avec douze prêtres abandonnant le ministère pour
se marier ». Il ajoute : « J’ai même béni le mariage de l’un d’entre
eux » mandaté pour cela par l’évêque. « Ici et là, des prêtres s’en
vont de plus en plus nombreux » soupire Gérard Naslin au point d’inquiéter
les évêques « d’autant plus que ces défections touchent souvent les
prêtres les plus jeunes et les plus entreprenants de leur diocèse ».
Quand Paul Winninger est entré au séminaire en Alsace « nous étions
trop nombreux à vouloir devenir prêtre ». Mais après plus de soixante
ans de ministère, il se dit : « le jour où je quitterai ce presbytère,
aucun prêtre ne viendra m’y remplacer ». Il milite depuis 1962 contre
le célibat sacerdotal, vestige « d’un système ecclésial ». Il est
révolté de voir l’Eglise priver les fidèles des « prêtres
nécessaires à la célébration de l’Eucharistie ». Il demande de «
prier pour que l’autorité de l’Eglise se convertisse » au mariage
des prêtres. Il remet à plus tard le sacerdoce des femmes, mais selon
lui « la plupart des théologiens estiment néanmoins qu’il n’y
aurait pas d’objection théologique à l’ordination des femmes ». Le
curé de Sainte-Thérèse à Nantes juge opportun d’ordonner des hommes
mariés et des femmes sinon « des communautés chrétiennes seront
bientôt sans prêtres. » A part Paul Winninger écrivant « le célibat
m’a été imposé », ses confrères ne regrettent pas leur consentement
du sous-diaconat. Mais tous pensent comme Joseph Guilbard : « Si l’Eglise
romaine revenait sur ce lien entre sacerdoce et célibat… je dirais “tant
mieux” ! » |