Le
cardinal Ratzinger et les droits de l’homme
Mais,
dira-t-on, le cardinal Ratzinger n’a jamais renoncé aux droits de l’homme...
Certes, et le dernier livre du cardinal, à paraître très bientôt en
langue française, ne nous détrompera pas sur ce point. Les bonnes
feuilles que le Courrier
international vient de nous en proposer marquent bien cet aspect de l’enseignement
du théologien Ratzinger : il rappelle, dans ce livre qui s’appellera
sans doute Des valeurs pour l’Europe
qu’au commencement de tout se trouve la dignité humaine : “ La première chose essentielle, c’est le caractère inconditionnel
de la dignité humaine et des droits de l’homme dans les législations
nationales. ” L’homme exact et rigoureux qu’il a toujours été
ne cherche pas à jouer sur les mots, en employant sans explications, un
langage antichrétien. Il ajoute donc immédiatement : “
Cette dignité de l’homme, prééminente et antérieure à toute action
et décision politique, renvoie en dernière instance au Créateur : lui
seul peut établir les droits essentiels et constitutifs de l’homme
auxquels nul ne saurait toucher. ” Et comme si cela ne suffisait pas
à lever les équivoques, il conclut: “
C’est ici un héritage essentiellement chrétien qui est codifié. ”
On
peut comprendre cette ultime formule de deux manières : soit le cardinal
avance l’idée que les droits de l’homme sont essentiellement
chrétiens, soit il explique que c’est en tant qu’ils sont
essentiellement chrétiens qu’il faut les reconnaître de manière
inconditionnelle. Soit, donc, il déclare, comme Jean Paul II dans son
dernier livre, que l’héritage des Lumières est identique à l’héritage
chrétien (ce qui serait pousser trop loin le bouchon et donc manquer la
manœuvre) ; soit il affirme qu’il faut corriger les Lumières et
redresser les droits de l’homme pour revenir à leur vérité, située
en deçà du siècle des Lumières et de toutes ses ambiguïtés. Mais
mieux vaut attendre la traduction française de son livre pour se
prononcer sur ce dilemme.
Pour
lors, on peut retenir néanmoins, quelle que soit l’issue de ce dilemme,
que le cardinal Ratzinger, en tant que théologien, ne reçoit la
thématique des droits de l’homme que dans sa version objective, dans la
mesure où cette thématique constitue une manière d’exprimer la loi
naturelle du respect de toute vie humaine en tant qu’humaine. Il ne s’agit
pas pour lui de diviniser la liberté du sujet humain, en considérant
comme respectable toute aspiration, tout souhait, tout désir, toute
revendication, du moment qu’il s’exprime en commençant par : “
Moi je... ”. |