Noël
Mamère vient d’annoncer que le 5 juin il allait marier deux
homosexuels, dont l’un réside à Bègles, la ville dont il est maire.
Emoi dans le Landernau. Ce petit coup d’Etat est un joli coup de pub. La
hardiesse de l’ancien présentateur télé est parfaitement calculée.
Qui va s’opposer à une telle action ? Qui contestera publiquement le
droit de Mamère à faire deux pères adoptifs potentiels de ces deux
personnes homosexuelles ? La société civile ne supporterait pas
longtemps des leçons de morale, ni en ce domaine ni en aucun autre!
Mamère joue sur du velours, sa provocation passera sans doute comme une
lettre à la poste. Et d’ici le 5 juin, il aura tout le loisir de se
faire inviter par toutes les télés de France et de Navarre.
Le
mariage des homosexuels correspond en effet à une exigence républicaine
tout à fait fondamentale, bien malin qui pourrait le contester. Il
relève de ce que tous les potaches ont appris à connaître sous le nom
de contrat social. L’idée de Jean-Jacques Rousseau, dans l’ouvrage
qui porte ce titre, c’est que nous soyons capables de revisiter toutes
nos relations, celles que nous impose la nature, avec nos parents ou nos
enfants, celles que nous impose la société, à travers le mariage
hétérosexuel et fécond par exemple... Tous ces "liens" nous
enferment et nous emprisonnent, c’est pourquoi nous portons " la
lettre sociale inscrite avec le fer ". Nous devons sortir de cet
esclavage qui nous tient de naissance et transformer toutes nos
dépendances en des relations volontaires, qui, dans l’idéal, seraient
comme autant de contrats. Nous prenons aujourd’hui le chemin de cette
société où plus rien n’est dû à la nature, où l’on ne veut même
plus prendre en compte la différence des sexes et où la liberté de l’individu
est totale : c’est parce que nous le voulons que nous avons des enfants,
c’est autant que nous le voulons que nous supportons un époux ou une
épouse, c’est avec le partenaire que nous aurons librement choisi que
nous aurons droit de faire notre vie. Jean-Jacques Rousseau lui-même
avait donné l’exemple de cette parfaite liberté en envoyant les uns
après les autres tous ses enfants à l’assistance publique. Il était,
ce faisant, pleinement en accord avec ses principes.
La
question du mariage des homosexuels (et la question subséquente de l’adoption
d’enfants par ces couples "mariés") va dans le sens
républicain de l’histoire. Ce n’est pas une provocation gratuite. C’est
une décision qui vient à son heure, que plusieurs pays ont prise ou sont
sur le point de prendre : la Belgique, les Pays-Bas, la Suède, la
Norvège. L’Espagne du socialiste Zapatero a inscrit ce projet dans son
programme. En France même, un petit événement a échappé à la plupart
des commentateurs : le 22 avril dernier, rue Cadet, dans le temple du
Grand Orient de France, a été officiellement célébrée, selon un vieux
rituel revisité, ce que l’on nomme l’adoption d’un conjoint comme
membre de la Fraternité maçonnique. Le Grand Orient étant une
obédience purement masculine, cette fois, pour la première fois, le
conjoint adopté, lui aussi, était un homme. Brandmeyer, le grand maître
a tenu à féliciter le nouvel adopté de manière particulièrement
cordiale.
Dans
la franc-maçonnerie française, la reconnaissance conjugale d’un couple
homosexuel a été célébrée le 22 avril
Je
ne suis pas du genre à voir des francs-maçons partout, mais, cette fois,
j’avoue, la coïncidence est particulièrement troublante. Dans la
franc-maçonnerie française, la reconnaissance conjugale d’un couple
homosexuel est célébrée le 22 avril. Et Noël Mamère, le 9 avril
(moins de quinze jours avant) annonce qu’il est prêt à marier à
Bègles en Gironde, dans sa mairie, un couple de résidants qui en ferait
la demande. Touchante coïncidence, qui montre bien que les frangins ont
décidé de faire bouger les mentalités en particulier dans ce domaine
sensible.
Si
la secte peut reprocher une chose à Noël Mamère, c’est d’avoir
senti le vent et de s’être engouffré dans cette brèche un peu vite,
histoire d’exploiter à son profit la grande affaire du jour. Qu’y
a-t-il de mal à cela ? direz-vous. Le député UMP François Baroin, dont
l’atavisme est bien connu, le reconnaissait, noir sur blanc, dans un
magazine spécialisé : " Il rend un très mauvais service à la
cause qu’il dit vouloir défendre ". |