Evêque
à la retraite, Mgr Guy
Herbulot se
prête à un passe-temps
favori de l'épiscopat : le livre d'entretiens. Il en résulte «
l'Espérance au risque d'un diocèse » où l'ancien évêque d'Evry
fait le bilan d'une collaboration de vingt-deux ans entre l'évêque,
les prêtres et les laïcs en vue de faire apparaître ce qu'il nomme
une « Eglise autre » ou une « Eglise renouvelée ».
La
perspective est résolument fidèle au Concile, alors même que le
Concile est déclaré en péril « au sein d'une Eglise qui trop souvent
se lamente ». On
assiste même, semble-t-il, à la manifestation «
de réserves frileuses », on
constate parfois hélas « une nostalgie dupasse ». Cela serait
sans importance venant de générations ayant dû
assister au « triste abandon de ce à quoi elles avaient toujours cru
». Or,
l'évêque s'en plaint, la « disparition des repères d'hier » provoque
aussi les jeunes à « la recherche des signes identitaires ». Cela
peut aller « si l'on n'y prend pas garde «jusqu'à la création
de redoutables « pôles de restructuration de la foi », cela peut
mener à « un retour en arrière, aux dépens de la mission ». La
première fonction de l'évêque est donc de veiller à ce qu'une «
recherche légitime
d'identité chrétienne » ne
conduise pas - par peur - à «
reconstruire les murailles » et
à « s'enfermer à l'intérieur ».
L'évêque
n'ignore pas les « affrontements entre catholiques » et en
particulier la crise lefebvriste.
En
n'acceptant pas la nouvelle messe, les mauvais sujets lefebvristes
marquent leur rejet de toute la théologie de Vatican II. D'où le
refus (sauf « par crainte du schisme » et parce que « nous
nous trouvons
souvent le dos au mur ») d'accorder
l'ancien rite à ceux qui en
font la demande. La pensée épiscopale est claire : « lorsque la
messe de saint Pie V est brandie comme une arme condamnant la doctrine
du nouveau missel, et, partant, l'ecclésiologie de Vatican II,
comment répondre positivement à des requêtes pour son utilisation ?
»
L'ecclésiologie
de Guy Herbulot est à l'image de sa cathédrale : une
colonne tronquée symbole de son humanisme maçonnique. Son Eglise
une Eglise bavarde, faite de commissions, de conseils, d'experts,
bien différente du vieux « triomphalisme clinquant ». Elle réintègre
les exclus, « aujourd'hui ». La pastorale « a mis l'accent
sur le sens de l'homme dans ce qu'il connaît, découvre et cherche lui-même
». Après
cela « il nous revient de vouloir que l'Eglise soit pour
Dieu. »
II
y a donc un gigantesque travail de « restructuration » à coup de
synodes et d'animateurs pour « une tâche exaltante laissant place à
la créativité ». Osons, dit l'évêque, les rencontres et les
partages ! Même
si son vieux rêve d'action catholique, appris à la JOC, rencontre
quelques difficultés : « ce ne fut pas facile d'appeler des laïcs à
participer à la mission pastorale du prêtre » !
Passer d'une « Eglise
organisation » à
une « Eglise signe » qui sera « vraiment catholique » est
rude, et beaucoup connaissent « la tentation de l'arrêt au milieu
du gué et du retour en arrière ».
Dans
la perspective du Concile, il a dû défendre la construction de la
mosquée « signe d'une liberté religieuse reconnue ». Il
inaugure un carré à part pour les morts musulmans au cimetière d'Evry et
il voit là « un signe d'intégration dans la société française ».
Pourtant
il assiste à la détérioration progressive des banlieues, il est témoin
de « véritables émeutes », il observe certains signes « de
la perte
de la dignité humaine », mais
il continue « à croire à l'autre ». Il
s'agit seulement de s'habituer : les cités' sont « l'image de ce que seront
la France et l'Europe de demain : de plus en plus pluriethniques,
pluri-religieuses ».
Aux
responsables de l'urbanisme venus parler de la construction d'une
cathédrale dans la ville nouvelle d'Evry, l'évêque répondait invariablement
: « il faut attendre ». « Nous étions encore à l'époque du
rejet des bâtiments symboliques et, pour l'Eglise, du rejet de toute
construction. » Et
puis, la ville grandissant, on se dit « le religieux peut trouver
là sa place ». Tout en rassurant « ceux qui craignaient
le retour du triomphalisme », l'évêque
en vient finalement à
« l'urgente nécessité de construire, et de construire une
cathédrale
». Maintenant
le diocèse dispose d'un « espace de vie, redevenu par
la résurrection du Christ, espace d'hommes d'espoir ».
La
synodalité en parallèle permet de vivre « l'ecclésiologie gfe Vatican
II » à
travers les experts, les équipes animatrices, les conseils
pastoraux, les secteurs, les chefs de projet. Avec eux, dans l'attente
de IV Eglise autre », on peut vivre « autrement en Eglise ». Débarrassé
des « pratiques antérieures » on est libre pour « faire l'Eglise
», œuvre
d'un peuple de Dieu « en pleine croissance prenant
en main son destin. »
Quant
à l'école catholique, c'est un « espace dépensée » pour un
nouveau défi « humanitaire, culturel ». L'évêque 1g garantit «
il ne s'agit pas d'évangélisation croix en main », même si «
la finalité de l'enseignement
catholique, c'est la proportion de l'Evangile ». C'est
que l'Eglise de Mgr Herbulot ne se conçoit que dans la démocratie. Au
passage, il regrette l'absence de l'Eglise lors du transfert des
cendres de l'abbé Grégoire
au
Panthéon. Cela a fait souffrir l'évêque qui attend la réhabilitation
de celui qui durant la Révolution
fut le chef des prêtres jureurs.
A
Evry, il a pu rencontrer toutes les religions. S'il n'est pas à la sortie
de la mosquée le vendredi c'est qu'il parle au Temple. A la cathédrale,
il accueille Rabbin et responsable de la mosquée, il faut « combler
le vide de notre ignorance, afin de dépasser l'intolérance ». Son credo
comporte l'absence « de toute forme de prosélytisme ». Il ne
néglige pas la formation des responsables de la catéchèse et organise
pour eux un enseignement du judaïsme sur trois ans : « le rabbin
Serfaty assurera la formation ». |