« Ô
Prophète !
Dis à
tes épouses,
à
tes filles et aux femmes des croyants, de ramener sur elles leurs grands
voiles : elles en seront plus vite reconnues et éviteront
d'être
offensées...»
dit la trente-troisième
sourate du Coran. Pour avoir prétendu
respecter, d'ailleurs fort au-delà
de la lettre, cette vague prescription, les jeunes Lila et Alma Lévy
ont relancé
la polémique
sur le voile et la laïcité
à la française.
Faut-il une loi pour interdire le voile islamique dans les établissements
scolaires ? La question est en passe de devenir l'une de ces
interrogations quasi-métaphysiques
dont notre microcosme politico-intellectuel est si friand.
Bien
entendu, soucieux de rester en prise avec notre temps, nos évêques
ne pouvaient rester en dehors de la polémique.
C'est ainsi que Mgr Ricard, archevêque
de Bordeaux, a voulu apporter sa modeste contribution à la controverse en affirmant que le port
de la croix ne le gênait
nullement chez les catholiques. Bien entendu, pour notre honorable prélat,
il ne s'agit que d'une croix portée
sous les vêtements.
Contrairement aux apparences, le propos archiépiscopal n'est pas excessivement surréaliste.
C'est ainsi que, dans la très
laïque
Turquie (et ce n'est pas une plaisanterie), des étudiantes
musulmanes en viennent à
mettre une perruque au-dessus de leur voile pour aller s'inscrire à
l'université.
Saluons
ici le courage de notre prélat bordelais qui se veut le défenseur
d'une Eglise humble, pauvre et discrète.
Ne pas se faire remarquer, ne pas faire de vagues, dissimuler sa foi comme
un avare cache son trésor,
tel doit être
désormais
le comportement du fidèle
qui montrera ainsi l'exemple aux croyants des autres religions. Soyons-en
sûrs,
moins les catholiques se montreront, moins nous verrons de voiles,
tchadors et autres burkas dans les rues de nos bonnes villes. Mais Mgr
Ricard pèche
par excès
de prudence, et, dans le souci de «
faire Eglise »
(comme on dit aujourd'hui dans les séminaires),
nous ne pouvons que lui indiquer de nouvelles pistes de réflexion
pour une catholicité
vestimentaire mieux adaptée
aux exigences du temps présent
L'exigence de laïcité,
si bien prise en compte par le président
de notre conférence
épiscopale
ne saurait se satisfaire de demi-mesures. Il va de soi, d'abord que la
soutane, et son corollaire, le col romain (vulgairement appelé «
carte de visite ») devront être
impitoyablement pourchassés.
Ne sont-ils pas le symbole d'un catholicisme exclusiviste, témoins
abhorrés
d'une Eglise hégémonique qui n'a plus sa place dans notre
France moderne ? Le nouveau clergé
doit être
invisible. Disparaissez, croix en bois d'olivier ou portées au veston, emblèmes attentatoires à la sainte laïcité,
et surtout manifestations d'un catholicisme «identitaire»
aux sinistres relents de repli dogmatique, voire (horresco referens !) de
traditionalisme honteux. Quant au vêtement
liturgique, il ne doit pas franchir le portail des églises (et encore ! pensez aux touristes
non croyants). Une fois résolu
le problème
du vêtement
ecclésiastique,
reste celui des religieux, moines, moniales et religieuses, étrangement attachés à
leur habit anachronique. Après
tout, quelle est la différence
entre le voile de la carmélite
et celui de la musulmane '. Ne sont-ils pas également signes d'aliénation (ainsi que le pensait sans doute
sainte Thérèse d'Avila) ? Proscrivons donc ces
oripeaux d'un autre temps. Désormais,
les moines devront porter le costume cravate (point trop minable pour ne
pas attirer l'attention), tandis que les bonnes sœurs iront en cheveux dans des tenues plus
affriolantes. Les tenues laïques
trop strictes éveilleraient
une légitime
suspicion. Et si l'Eglise ne doit pas être
soupçonnée
d'une chose, c'est bien d'intégrisme. |