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Les évêques et la laïcité

Jean-Michel Hardy

Pacte n°80 - 30 novembre 2003

Rien de bien nouveau à ajouter au dossier de la laïcité : on nous rebat les oreilles de l'exigence laïque, mais pour l'instant, aucun événement ne vient changer la donne.

Il faut tout de même mentionner une légère inflexion du discours des évêques de France, réunis à Lourdes au début de ce mois. Témoin, Mgr Doré, théologien en titre de l'épiscopat. Dans un entretien avec Elie Maréchal, du Figaro, il s'explique sur les nouveaux éléments constitutifs de la laïcité française « Alors que l'État et les religions avaient progressé jusqu'à récemment dans un dialogue mutuel et constructif, on en vient à réfréner le droit équitable pour tous, par crainte d'un excès de droit revendiqués par une minorité ». Et de porter ce diagnostic sans appel sur les relations actuelles entre l'Église et l'Etat : « L'islam étant présenté comme un danger du fait des islamistes, la laïcité française se crispe, tend même à régresser vers un laïcisme sourcilleux ». Le terme de laïcisme n'est pas habituel dans la bouche d'un évêque, que sa fonction incline en général à tous les compromis avec la République. Il faut que la situation soit en effet plus préoccupante qu'on ne le dit pour que l'on en soit arrivé à une telle absence de langue de bois.

Mais ce n'est pas tout. Ajoutons que désormais les évêques n'hésiteront plus à revenir sur l'idée d'une fonction publique de l'Église dans la société laïque : « L'islam oblige à considérer à nouveau que toute religion a un impact publique ». n ne s'agit pas de déférer à la volonté de ceux qui entendent « confiner (le religieux) dans le sanctuaire de la conscience ».

Oh ! Cela ne signifie pas que Mgr Doré aurait abjuré la « liberté de recherche » de chaque croyant, telle que l'enseigne le second concile du Vatican. Cela ne veut pas dire que la société se devrait de pratiquer une sorte de préférence catholique, reconnaissant ainsi une autorité à l'Eglise fondée par Jésus Christ pour le salut de l'humanité. Notons d'ailleurs que les évêques ne parlent plus jamais nommément de l'Église catholique quand ils s'expriment sur la laïcité ; ils parlent « des religions » (raisonnables) et « des intégrismes » (déraisonnables). Selon eux, il n'y a aucune différence entre ces deux institutions religieuses que sont l'Église catholique et le club des adorateurs de l'oignon, sinon peut-être quant au nombre des adeptes de l'une et de l'autre organisation.

Dans leur esprit, loin de toute discrimination, chaque religion a donc le même droit à l'espace publique dans une société essentiellement procédurale,' c'est-à-dire qui ne reconnaît de vérité que celle qui naît du débat. Ce que réclame Mgr Doré, par conséquent, ce n'est pas du tout le droit strict de la Vérité catholique a être reconnue comme telle dans son ordre (surnaturel) par la société civile, mais c'est la faculté de participer, en bonne place, aux différents débats qui traversent l'espace publique.

Bref, rien de bien nouveau, en somme : tout en reconnaissant qu'elle a du plomb dans l'aile, c'est la fameuse «laïcité ouverte» à laquelle aspire Mgr Doré. A défaut d'être pasteurs d'âmes, puisque décidément Vatican II ne remplit pas leurs églises désespérément vides, les évêques pourront toujours se recycler comme experts en religion. Ils seront consultés comme tels.