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Bataille de cardinaux

Abbé de Tanoüarn

Pacte n°80 - 30 novembre 2003

Beaucoup de bruit pour rien ! C'est sans doute ce que penseront ceux qui ont assisté samedi 22 novembre à la messe de Sainte-Cécile, célébrée selon le rite traditionnel à Paris par le cardinal Médina Estevez, ancien préfet de la Congrégation romaine pour le culte divin... Beaucoup d'émissions sur Radio-Courtoisie. Beaucoup de musique. Et, à l'attention des liturgistes, un colloque du Ciel, miraculeusement transporté à Paris. Tout cela pour quoi ? Pour que le cardinal nous enseigne - au cours du colloque justement - que les filles enfants de chœur, ce n'est pas si choquant qu'on le dit ou que la participation des laïcs à l'eucharistie peut les conduire à animer des Assemblées dominicales en l'absence de prêtre. Le résultat est mince en apparence ! Pas un mot du rite traditionnel, dit de Saint Pie V. Les fidèles auront dû se contenter d'une magnifique cérémonie. Mais d'une cérémonie muette ! On comprend les jeunes de Saint-Nicolas-du-Chardonnet, diffusant à la sortie de la Messe un tract intitulé : Non à la messe d'un jour, oui à la messe de toujours. Et on se prend à évoquer la messe de Saint Pie V que célébra le cardinal Lustiger, le 2 juillet 1988, dans sa cathédrale, archi-comble. Nous étions à quelques jours des sacres du 30 juin par Mgr Lefebvre. Mais cette messe qui valait bien une promesse, resta sans lendemain.

Les Parisiens savent bien qu'ils n'ont rien à attendre de leur archevêque pour ce qui est de la messe traditionnelle et de son avenir dans la capitale. Est-ce vrai ? Le bruit court en tout cas que Son Eminence avait refusé au cardinal Médina la possibilité de procéder, dans son diocèse, aux ordinations sacerdotales de candidats issus de la Fraternité Saint-Pierre. On ne peut pourtant pas reprocher à cette pauvre Fraternité Saint Pierre sa désobéissance. La plupart d'entre ses membres sont confits en protestations d'amour du pape et l'un ou l'autre tente de justifier le pontificat jusque dans ses dimensions dangereusement œcuméniques. Mais vu de l'archevêché, les chrétiens qui font confiance à la Fraternité Saint Pierre sont tout aussi coupables que ceux qui militent avec la Fraternité Saint-Pie X. Les prêtres qui célèbrent la messe à leur intention doivent donc célébrer aussi habituellement la messe de Paul VI et surtout, ils ont reçu mission de ramener le troupeau à l'amour du concile dans l'acceptation sans condition des nouvelles formes liturgiques. Dans l'Eglise du cardinal Lustiger, il n'y a pas de place pour des défenseurs authentiques de la Tradition. C'est ainsi que l'on peut expliquer son oukase contre la Fraternité Saint-Pierre (qui n'est pas représentée dans le diocèse) et son refus au cardinal Médina.

Seulement voilà ! Le cardinal Médina s'est vexé. D a insisté et il a obtenu (comme lot de consolation en quelque sorte : à défaut des ordinations) de pouvoir célébrer cette messe "sans enjeu" dans l'église Saint-Eugène Sainte-Cécile, à l'occasion de la fête de la sainte patronne de la paroisse. Sic transit ! Alors que l'ancien préfet romain parle très bien français et qu'il aime pratiquer notre langue, on l'a vu (durant vingt minutes) arc-bouté au texte de son sermon, lisant son papier sans jamais en sortir, et entretenant les fidèles, qui venaient pour la messe, des beautés secrètes du chant grégorien. Sans doute avait-il dû faire viser le texte de son homélie au préalable...

Dans cette bataille des cardinaux, si l'on regarde les choses de près, le dernier mot semble donc bien revenir au cardinal Lustiger, qui freine autant qu'il le peut le retour aux formes traditionnelles, réclamé pourtant par ses fidèles. Pourquoi une telle faiblesse de la part du cardinal Médina ? Pourquoi les ordinations de la Fraternité Saint Pierre n'ont-elles pas pu avoir lieu à Paris ? Pourquoi ont-elles finalement trouvé refuge à l'abbaye de Fontgombault ? L'ancien Préfet de la Congrégation pour le culte divin est divisé en lui-même. Ses déclarations récentes sont contradictoires. Comment faire prévaloir un point de vue dont on n'est pas soi-même sûr ?

Petite rétrospective : c'est le cardinal Médina qui est l'auteur d'un document publié le 5 novembre 1999, par la Congrégation dont il avait la charge, stipulant que le rite de Saint-Pie V n'avait plus aucune existence légale dans l'Eglise. Il prenait ainsi le contre-pied de la Bulle de Saint Pie V, Quo primum tempore, garantissant par avance à tout prêtre catholique le droit de célébrer la messe dans le rite qu'il venait de codifier. Et pourtant, quelques années plus tard, en 2001, le même cardinal, sans avoir fait aucune repentance, du moins à notre connaissance, affirmait au périodique américain The Latin Mass : « J'ai soigneusement étudié la question de l'abrogation du rite de Saint Pie V après le concile Vatican II. Sur la base de mes recherches, je ne puis conclure que le rite de Saint Pie V ait jamais été abrogé... » Pour gagner une prochaine bataille de cardinaux, il faut sans doute que le cardinal Médina étudie encore un peu plus, qu'il oublie ces formules alambiquées et parvienne à une position claire. A une véritable affirmation.